Alors
qu’elles ont un positionnement central dans les organisations du
travail, les professions intermédiaires sont souvent enfermées dans le «
ni cadre, ni ouvriers » et privées de reconnaissance.
La colère
salariale et la peur du déclassement en sont l’illustration. 83 % des
professions intermédiaires interrogées estiment que les mesures
annoncées par le gouvernement ne vont pas améliorer leur pouvoir d’achat.
Les professions techniciennes et intermédiaires souffrent
d’un important manque de reconnaissance professionnelle. Parmi les
sondé·e·s, plus d’une personne sur deux ne s’estime pas reconnue dans
son travail (51 %).
D’une
manière générale, le sentiment « d’être reconnu·e dans son travail »
reste très bas à 36 %.
Leur
niveau d’implication dans le travail et la hausse de leur charge de
travail en conduit 54 % à effectuer des heures supplémentaires. Cela ne
se traduit pas pour autant par une meilleure reconnaissance des
qualifications, ni par une revalorisation salariale.
Un mécontentement salarial
Les
sondé·e·s expriment une insatisfaction très forte sur plusieurs
déterminants de leur vie au travail qui quantifient la reconnaissance
professionnelle :
- l’insatisfaction sur le niveau de
rémunération est très largement majoritaire au regard du temps de
travail réel (55 %), des responsabilités exercées (60 %), de la
qualification détenue (56 %). Cette insatisfaction atteint des sommets
par rapport à la charge de travail (65 %) et au degré d’implication (67
%).
- l’accès à la formation professionnelle correspond aux besoins professionnels dans seulement 52 % des cas.
Ainsi, 54 % du privé des salarié·e·s considèrent que leur niveau de rémunération n’est pas en
adéquation avec leur niveau de responsabilité.
L’écart est aussi important pour chacun des autres critères :
- niveau de qualification (70.5 % Fonction publique vs 48,6 % secteur privé)
- temps de travail réel (67.9 % vs 49.1 %)
- charge de travail (75.9 % vs 60.1 %)
- implication (78.7 % vs 62.5 %)
Lorsque
la reconnaissance intervient elle se manifeste le plus souvent sous
forme de reconnaissance sociale (68 %).
Viennent ensuite la
reconnaissance par évolution professionnelle (34 %), puis par le salaire
(33 %).
La reconnaissance sociale, qui est la forme la plus utilisée, l’est surtout pour les femmes par rapport aux hommes (67.4 % vs 68.2 %).
Un temps de travail qui fait exploser les compteurs légaux.
À
l’instabilité des organisations de travail et des situations
individuelles, s’ajoute un contexte de charge de travail importante
conjuguée à l’usage des outils numériques qui provoquent une
augmentation de l’intensité du travail et prolonge le lien de
subordination hors travail en effaçant les frontières
spatio-temporelles.
Les
professions techniciennes et intermédiaires déclarent travailler plus de
40 heures par semaine pour 62 % d’entre elles, et plus de 45 heures
hebdomadaires pour 24 % d’entre elles.
Cette
évolution va à l’encontre des aspirations exprimées par ces salarié·e·s à
plus d’équilibre entre leur vie privée et professionnelle, et à une
meilleure qualité de vie au travail.
Il
est nécessaire de réinterroger les organisations du travail, le mode de
management (délai de plus en plus court, objectifs de plus en plus
déconnectés de la réalité…), la charge de travail et son évaluation,
notamment au regard des moyens dont on dispose pour exercer son activité
professionnelle.
Banalisation des heures supplémentaires et du travail gratuit
Les
heures supplémentaires sont banalisées au point d’être structurellement
nécessaires pour assurer l’activité professionnelle normale, même en
période de baisse d’activité économique.
Cette
réalité est désormais partagée par 54 % des sondé·e·s. Les jeunes (<
30 ans) sont ceux qui sont le plus concernés (61.5 %), ainsi que la
tranche 30 – 39 ans (58.7 %).
Ces
heures supplémentaires sont payées dans 31 % des cas et récupérées dans
35 % des cas. Pour 34 % des sondé·e·s, il n’y a ni paiement ni
récupération de ces heures supplémentaires effectuées.
À
noter les différences importantes entre les femmes et les hommes entre
la préférence pour le paiement des heures supplémentaires (24.7 % vs
38.8 %) ou leur récupération (40.1 % vs 29.4 %), liée au fait que les
femmes assurent toujours l’essentiel des tâches ménagères et que leur
temps de travail est plus contraint.
Intensification et dégradation du travail
L’augmentation
de la charge de travail et des heures supplémentaires dans un contexte
d’accroissement des responsabilités caractérisent la vie au travail des
sondé·e·s.
L’augmentation
de la charge de travail est une réalité largement partagée dans les
professions techniciennes et intermédiaires, à hauteur de 58 %, quels
que soient le secteur professionnel et la taille de l’entreprise.
L'urgence du droit à la déconnexion
Le
cadre d’exercice professionnel est marqué par une charge de travail en
forte croissance avec des heures supplémentaires structurelles pour
assurer le fonctionnement des services. Dans ce contexte, l’usage actuel
des TIC participe à l’intensification du travail pour 53,1 % dans le privé concernant les professions salariales de technicien-nes et "intermédiaires".
Débordement de la vie professionnelle sur la vie privée
Sans
surprise le débordement de la vie professionnelle sur la vie privée est
une réalité pour 1 sondé·e sur 2 (44 % vs 48 %). Dans le même temps, 1
sondé·e sur 2 (43 % vs 45 %) estime que l’usage des nouvelles
technologies permet plus de facilité dans le travail.
Si
les femmes et les hommes affichent sensiblement la même perception de
débordement de la vie professionnelle sur la vie privée (44.6 % vs 43.6
%), elles considèrent davantage que l’usage des TIC facilite le travail (47.8 % vs 38 %).
Un lien de subordination étendu
Avec
l’usage actuel des nouvelles technologies, les professions
techniciennes et intermédiaires sont contraintes à une importante
disponibilité et à une réactivité permanente afin de répondre aux
multiples sollicitations liées aux difficultés à pouvoir accomplir ses
tâches dans un contexte d’intensification du travail, de dispersion et de fragmentation de l’activité. Cela montre que l’usage des TIC aurait tendance à pallier les déficits organisationnels.
64 % des professions techniciennes et intermédiaires souhaitent disposer d’un droit à la déconnexion effectif
Cette aspiration est aujourd’hui largement majoritaire quel que soit la taille de l’entreprise et le secteur d’activité.
Après
l’entrée en vigueur de la loi qui a introduit cette obligation de
négociation, force est de constater dans les faits l’insuffisance. En
effet, pour satisfaire l’obligation légale, il suffit pour l’employeur
de mettre en place une charte unilatérale.
Après avoir été la première
organisation syndicale à tirer la sonnette d’alarme sur le travail
numérique en dehors du temps et du lieu de travail des salarié.e.s.
La CGT va poursuivre sa bataille pour la réduction du temps de
travail et la conquête de nouveaux droits à l’heure de la transformation
numérique avec sa campagne « Construire le numérique autrement », et
notamment avec le guide « Droit à la déconnexion ».
L'éthique professionnelle est mise à mal
68 % des professions technicien-nes et intermédiaires confrontées à des problèmes d’éthique professionnelle
En
situation de travail, l’éthique professionnelle entre en contradiction
avec les choix et pratiques réelles dans 68 % des cas : souvent (19 %),
de temps en temps (49 %).
Être confronté à une telle situation est une
source de mal être certain pour les salarié·e·s. Conjugué à l’exposition
à d’autres facteurs défavorables à l’exercice normal de sa profession,
comme la surcharge de travail, le manque de reconnaissance, ou de
soutien cela peut conduire à la perte de repères et à l’épuisement
professionnel.
Ce
résultat témoigne de l’attachement des salariés à vouloir travailler en respectant les règles et
l’éthique professionnelle, même dans un contexte défavorable.
Pour un droit d’alerte, de refus et d’alternative
57
% des professions technicien-nes et intermédiaires souhaitent disposer
d’un droit d’alerte dans le cadre de l’exercice de leurs
responsabilités, afin de pouvoir refuser de mettre en œuvre des
directives contraires à leur éthique.
Pour
l’Ugict-CGT, il est urgent de donner un statut protecteur à tout
salarié rapportant des faits contraire à l’éthique ou à la déontologie
professionnelle.
L’exemple significatif des lanceurs d’alertes montre
jusqu’où peuvent aller les atteintes à l’intérêt général et la
vulnérabilité de ses salariés qui s’exposent pour faire prévaloir
l’éthique et l’intérêt général.
L’Ugict-CGT va porter cette proposition dans le cadre de la négociation sur le statut de l’encadrement .
Management et mal travail
Un travail qui perd son sens
Dans
ce contexte de travail instable et tendu, 44 % des sondé·e·s estiment
ne pas pouvoir faire un travail de qualité.
Des pratiques managériales qui se dégradent
La dégradation des conditions d’exercice professionnel s’accompagne de pratiques managériales qui sont contestées.
48
% des sondé·e·s estiment que les pratiques managériales se sont
dégradées au cours de l’année, seulement 14 % voient une amélioration et
38 % pas de changement.
L’évaluation individuelle est largement discréditée car jugée :
- Pas fondée sur de bons critères par 67 % des sondé·e·s.
- Pas transparente par 60 % des sondé·e·s.
- Ne reconnaissant pas le travail par 68 % des sondé·e·s.
C’est à l’approche de la 2ème
partie de carrière (40 ans) que le ressentiment est le plus fort sur
les critères de l’évaluation (supérieur à 73 %). Cela montre que le
système de gestion des personnels de ces catégories peine à apporter des
solutions pour valoriser l’expérience professionnelle et les
qualifications acquises.
Le déficit de reconnaissance
et le manque de perspective d’évolution professionnelle renforcement la
vision critique de cette appréciation des professions techniciennes et
intermédiaires sur les pratiques managériales en vigueur dans les
entreprises publiques et privées.
Défendre ses droits
Compter d’abord sur soi-même
Majoritairement,
à hauteur de 53 %, les professions technicien-nes et intermédiaires sont
d’abord sur une approche individuelle pour défendre leurs droits et
leur emploi.
Les syndicats arrivent en 2ème position (25 %), devant les avocats (11 %), la direction (7 %), les pouvoirs publics (3 %) et les partis politiques (1 %).
L’analyse
par taille d’entreprise montre que le défaut d’implantation syndicale
favorise l’approche individuelle.
Ainsi, dans les petites entreprises de
moins de 50 salarié·e·s les professions techniciennes et intermédiaires déclarent d’abord compter sur eux-mêmes
(64.1 %), les syndicats viennent en deuxième position (12.2 %). Ils
placent les directions et les avocats quasiment au même niveau (8.6 % vs
9.7 %) pour se défendre.
Le
déterminant de la présence syndicale se retrouve également en comparant
les résultats entre la Fonction publique et le secteur privé, pour la
confiance accordée aux syndicats pour défendre les droits et l’emploi.
Dans la Fonction publique où les syndicats sont plus présents, les
syndicats malgré cela arrivent (36.8 %) après l’approche individuelle
(44.3 %).
Bonne fin de semaine mais voici quelques chiffres et résultats qui nous en sommes ne vous laisserons pas indifférents !